Comment reconnaître une surdose de sédatifs et de médicaments pour dormir

novembre 16, 2025 Loïc Grégoire 10 Commentaires
Comment reconnaître une surdose de sédatifs et de médicaments pour dormir

Une surdose de sédatifs ou de médicaments pour dormir n’est pas un simple sommeil profond. C’est une urgence médicale qui peut tuer en quelques minutes. Beaucoup pensent que ces pilules sont sûres parce qu’elles sont prescrites, ou qu’on les trouve en vente libre. Mais quand on en prend trop - même un peu plus que la dose recommandée - le corps peut s’arrêter de respirer. Et personne ne le voit venir.

Les signes qui ne trompent pas

Le premier signe, souvent ignoré, c’est la non-réactivité. Si la personne ne répond pas quand vous la secouez fort, quand vous lui parlez haut et clairement, ou quand vous faites une pression sur le sternum (le milieu de la poitrine), ce n’est pas qu’elle dort profondément. C’est qu’elle est en train de perdre le contrôle de son système nerveux central.

Ensuite, observez la respiration. Une personne normale respire entre 12 et 20 fois par minute. En cas de surdose, ce nombre chute. Moins de 8 respirations par minute, c’est un signal d’alerte rouge. La respiration devient superficielle, irrégulière, parfois presque inexistante. Les lèvres, les doigts, les ongles peuvent devenir bleuâtres - c’est le cyanose. Cela signifie que le sang ne transporte plus assez d’oxygène. C’est grave. Très grave.

La parole aussi change. Les mots sortent pâteux, entrecoupés, comme si la personne avait bu beaucoup d’alcool. Mais elle n’a pas bu. C’est le médicament qui la rend ainsi. Elle peut aussi être complètement désorientée : ne pas savoir où elle est, ne pas reconnaître ses proches, ne pas se souvenir de ce qui vient de se passer. C’est une forme d’amnésie qui empêche de former de nouveaux souvenirs.

Le corps perd aussi son équilibre. Elle titube, tombe, ne peut plus tenir debout sans s’appuyer. Même tenir une tasse est impossible. C’est l’ataxie - un manque de coordination musculaire directement lié à la dépression du cerveau. Et tout cela peut aller jusqu’au coma : une perte totale de conscience, mesurée par une échelle de Glasgow inférieure à 8.

Différences entre les types de médicaments

Tous les somnifères ne se ressemblent pas. Les benzodiazépines (comme le zolpidem, l’alprazolam ou le temazepam) et les « Z-drugs » agissent sur le cerveau de façon similaire, mais leur danger varie.

Les benzodiazépines, même en surdose, gardent souvent une pression artérielle et un rythme cardiaque relativement stables - jusqu’au moment où la respiration s’arrête. C’est ce qui les rend trompeuses. La personne semble « juste très endormie », alors qu’elle est en train de mourir lentement.

Les barbituriques, beaucoup moins prescrits aujourd’hui, sont bien plus dangereux. Ils dépressent la respiration à des doses bien plus faibles. Un seul excès peut être fatal.

Les somnifères en vente libre, comme ceux contenant du diphenhydramine (Tylenol PM, Benadryl), sont un autre piège. Ils provoquent une somnolence extrême, mais aussi une bouche sèche, une rétention urinaire, et parfois des hallucinations ou des crises. Ce ne sont pas des sédatifs classiques, mais leur surdose peut aussi tuer, surtout chez les personnes âgées ou celles qui prennent d’autres médicaments.

Le melatonin, lui, est différent. Même en prenant 60 fois la dose normale, les symptômes restent légers : maux de tête, nausées, étourdissements. Pas de dépression respiratoire. Ce n’est pas un sédatif puissant, et une surdose n’est presque jamais vitale.

Le pire danger : les mélanges

Le vrai risque, c’est quand les sédatifs sont mélangés. Avec de l’alcool ? C’est une bombe. Avec des opioïdes comme le fentanyl ? C’est une sentence de mort. La combinaison double ou triple la dépression respiratoire. Selon les données du CDC, 23 % des décès liés aux benzodiazépines en 2021 impliquaient aussi du fentanyl. Ce n’est pas une coïncidence. C’est une tendance meurtrière.

Beaucoup de gens ne réalisent pas qu’un simple verre de vin avec leur somnifère peut être fatal. Ou qu’un analgésique contenant de l’oxycodone, pris avec du zolpidem, peut stopper la respiration sans avertissement. Les médecins le disent : il n’y a pas de « dose sûre » quand on mélange. Le corps ne peut pas gérer cette combinaison.

Deux mains comptant les respirations d'une personne endormie, avec des médicaments et un verre de vin sur la table.

Que faire en cas de suspicion ?

Ne perdez pas de temps à chercher des réponses sur Google. Ne laissez pas la personne « se réveiller toute seule ». Ne la laissez pas dormir sur le côté en espérant que ça passera.

Voici ce qu’il faut faire immédiatement :

  1. Évaluez la réactivité : Criez son nom, secouez-le doucement, puis faites une pression ferme sur le sternum (le centre de la poitrine). S’il ne réagit pas, c’est une urgence.
  2. Comptez la respiration : Regardez sa poitrine pendant 30 secondes. Si elle respire moins de 6 fois, c’est un arrêt respiratoire en cours.
  3. Regardez les lèvres et les ongles : Sont-ils bleus ? C’est un signe que le sang manque d’oxygène.
  4. Appelez les secours : Composez le 15 (SAMU) ou le 112. Dites clairement : « Je soupçonne une surdose de somnifères. La personne est inconsciente et respire très peu. »
  5. Commencez la respiration artificielle : Si elle ne respire pas, ou si elle respire moins d’une fois toutes les 5 secondes, commencez à lui donner des souffles toutes les 5 secondes. Ne l’abandonnez pas.

Ne lui donnez jamais de flumazenil (le médicament qui inverse l’effet des benzodiazépines). Ce n’est pas un antidote à prendre à la maison. Il peut provoquer des crises chez les personnes dépendantes. Les hôpitaux l’utilisent avec précaution, sous surveillance. À la maison, c’est dangereux.

Les erreurs courantes qui coûtent des vies

Les études montrent que 68 % des témoins pensent d’abord que la personne « est juste très fatiguée ». Un ami sur Reddit raconte avoir pensé que son colocataire « dormait juste très profondément après une longue semaine ». Il a attendu 47 minutes avant d’appeler les secours. La personne est morte.

Un autre croit que « c’est juste de l’alcool ». Mais la personne n’a pas bu. C’est du zolpidem. Et la respiration ralentit. Sans intervention, elle s’arrête.

Beaucoup aussi pensent que « puisque c’est une ordonnance, ça ne peut pas être mortel ». Ce n’est pas vrai. En 2021, plus de 12 500 personnes sont mortes aux États-Unis d’une surdose de benzodiazépines. Le nombre a augmenté de 218 % depuis 2010. Ce n’est pas un phénomène rare. C’est une crise de santé publique.

Une équipe médicale en urgence dans une salle d'hôpital au lever du jour, une famille en arrière-plan, des pilules éparses au sol.

Comment prévenir ?

Si vous ou quelqu’un que vous aimez prenez ces médicaments :

  • Ne prenez jamais plus que la dose prescrite.
  • Ne mélangez jamais avec de l’alcool, des opioïdes ou d’autres somnifères.
  • Conservez les médicaments hors de portée des enfants et des adolescents.
  • Si vous avez des doutes sur votre consommation, parlez-en à votre médecin. Il existe des alternatives non médicamenteuses pour dormir : thérapie cognitivo-comportementale, hygiène du sommeil, régularité des horaires.
  • Si vous avez un proche qui prend ces médicaments, gardez une bouteille de naloxone à la maison - même si elle ne fonctionne pas sur les sédatifs, elle peut sauver une vie en cas de mélange avec des opioïdes.

La prévention, c’est aussi savoir reconnaître les signes avant-coureurs : une personne qui dort plus que d’habitude, qui semble « éteinte », qui oublie les conversations, qui tombe souvent. Ce n’est pas de la paresse. C’est un avertissement.

Que faire après avoir sauvé une vie ?

Si vous avez reconnu une surdose à temps et que la personne a été sauvée, ce n’est pas la fin. C’est le début d’un besoin de soutien. Beaucoup de personnes qui ont fait une surdose souffrent d’anxiété, de troubles du sommeil chroniques, ou d’une dépendance non diagnostiquée.

Le médecin doit évaluer s’il y a un trouble de l’usage de sédatifs. Des questionnaires comme le Benzodiazepine Dependence Self-Report Questionnaire (8 items) sont utilisés dans les urgences pour détecter les risques. La prise en charge psychologique, les groupes de soutien, les thérapies comportementales sont essentielles pour éviter une récidive.

Ne laissez pas cette personne seule après l’urgence. Une surdose n’est pas juste un accident. C’est souvent le signe d’un mal plus profond.

Comment savoir si quelqu’un fait une surdose de somnifères et non qu’il dort simplement profondément ?

La différence, c’est la réactivité. Une personne qui dort profondément réagit à une stimulation forte : un cri, une secousse, une pression sur le sternum. Une personne en surdose ne réagit pas du tout. En plus, sa respiration est très lente (moins de 8 respirations par minute), ses lèvres sont bleues, et sa peau est froide et humide. Ce n’est pas un sommeil normal - c’est une dépression du système nerveux central.

Est-ce que le melatonin peut provoquer une surdose mortelle ?

Non. Même en prenant 60 fois la dose recommandée (240 mg), le melatonin ne cause pas de dépression respiratoire. Les symptômes sont limités à des maux de tête, des nausées ou des étourdissements. Ce n’est pas un sédatif puissant comme les benzodiazépines ou les Z-drugs. Il ne bloque pas la respiration. Une surdose de melatonin est rarement dangereuse, contrairement aux médicaments sur ordonnance.

Pourquoi ne pas donner le flumazenil à la maison ?

Le flumazenil peut inverser l’effet des benzodiazépines, mais il est extrêmement dangereux à utiliser sans surveillance médicale. Chez les personnes dépendantes, il peut provoquer des crises d’épilepsie sévères, voire mortelles. L’FDA a documenté 17 décès liés à son utilisation incorrecte. Il ne doit être administré que dans un hôpital, avec un accès immédiat à une réanimation.

Les médicaments en vente libre pour dormir sont-ils plus sûrs que les ordonnances ?

Pas du tout. Les somnifères en vente libre comme le diphenhydramine (Benadryl, Tylenol PM) peuvent provoquer des surdoses mortelles, surtout chez les personnes âgées. Ils causent une somnolence extrême, une bouche sèche, une rétention urinaire, et à fortes doses, des hallucinations ou des crises. Leur danger est sous-estimé parce qu’ils sont sans ordonnance - mais ils dépressent le système nerveux, et en excès, ils peuvent arrêter la respiration.

Quelle est la différence entre une surdose de benzodiazépines et une surdose d’opioïdes ?

Les surdoses d’opioïdes (comme l’heroin ou le fentanyl) se reconnaissent souvent aux pupilles très petites (« pupilles en pointe »). Les surdoses de benzodiazépines n’ont pas ce signe. Elles se reconnaissent plutôt par l’absence totale de réactivité, une respiration très lente, et des signes de dépression nerveuse sans douleur ni pupilles rétrécies. Mais si les deux sont mélangés, les signes se mélangent aussi - et le risque de mort augmente drastiquement.

Combien de temps faut-il pour qu’une surdose devienne mortelle ?

Cela dépend de la dose, du médicament, et de la rapidité de l’intervention. Mais chaque minute compte. Une étude montre que pour chaque minute de retard dans l’action, la probabilité de survie diminue de 7 à 10 %. Si la respiration s’arrête complètement, le cerveau commence à mourir après 3 à 5 minutes. C’est pourquoi agir en moins de 10 minutes est crucial.


Loïc Grégoire

Loïc Grégoire

Je suis pharmacien spécialisé en développement pharmaceutique. J'aime approfondir mes connaissances sur les traitements innovants et partager mes découvertes à travers l'écriture. Je crois fermement en l'importance de la vulgarisation scientifique pour le public, particulièrement sur la santé et les médicaments. Mon expérience en laboratoire me pousse à explorer aussi les compléments alimentaires.


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10 Commentaires


Gert-jan Dikkescheij

Gert-jan Dikkescheij

novembre 17, 2025

Je suis médecin en Suisse et j'ai vu trop de cas où les gens pensaient qu'un somnifère c'était comme un paracétamol. La respiration qui ralentit, les lèvres bleues, le silence... c'est pas du sommeil, c'est un arrêt progressif. Et la plupart du temps, les proches attendent « qu'elle se réveille » comme si c'était une sieste. J'ai perdu un patient il y a deux semaines à cause de ça. Il avait pris du zolpidem avec un verre de vin. Juste un verre.

On a besoin de campagnes de sensibilisation, pas juste des notices en petits caractères.

Véronique Gaboriau

Véronique Gaboriau

novembre 17, 2025

Et bien sûr que c’est une crise de santé publique. Les pharmas ont payé des médecins pour dire que c’était sans danger. Les gens meurent parce qu’on leur a menti pendant des années. Et maintenant on veut qu’on apprenne à compter les respirations comme des infirmiers ?

La vraie question, c’est pourquoi on laisse des trucs aussi dangereux en vente libre. C’est pas un médicament, c’est une arme à retardement.

Marc Heijerman

Marc Heijerman

novembre 18, 2025

bonjour j'ai lu ce truc et j'ai juste envie de dire que le melatonin c'est une blague de pharmacien. 240mg c'est quoi une overdose de sucre ? j'ai pris 80mg une fois pour tester et j'ai rêvé que j'étais un oiseau qui volait au-dessus des Alpes. pas de mort. pas de coma. juste un truc bizarre.

les vrais dangers c'est les benzodiazépines et les barbituriques. et encore, c'est surtout quand on les mixe avec du fentanyl ou du vin. sinon c'est juste une sieste longue.

Deb McLachlin

Deb McLachlin

novembre 20, 2025

Le fait que des personnes âgées prennent des diphenhydramine pour dormir est un scandale. Ces médicaments ont un effet anticholinergique qui accélère la déclin cognitif. Ce n’est pas une solution pour l’insomnie du troisième âge, c’est une forme de négligence médicale. Les études montrent clairement une corrélation entre leur utilisation à long terme et la démence. Pourquoi les médecins les prescrivent-ils encore ? Parce que c’est facile. Parce qu’ils ne veulent pas investir dans la thérapie cognitivo-comportementale. C’est un choix systémique, pas un accident.

Teresa Jane Wouters

Teresa Jane Wouters

novembre 21, 2025

Vous savez ce qui est vraiment effrayant ? C’est que tout ça, c’est une diversion. Les vrais responsables, c’est le gouvernement qui a laissé les laboratoires vendre des produits toxiques comme des bonbons. Et les médias ? Ils ne parlent que des opioïdes. Mais les benzodiazépines ? Silence total. Pourquoi ? Parce que les médecins en prescrivent des tonnes. Et les politiques ne veulent pas mettre en cause leur propre système. C’est une conspiration. On vous fait croire que c’est votre faute si vous avez pris trop de somnifères. Mais non. C’est eux qui vous ont mis dans cette situation.

Luc Muller

Luc Muller

novembre 22, 2025

Je suis un peu en colère après avoir lu ça. J'ai un cousin qui est mort comme ça. On a cru qu'il dormait. On a attendu deux heures. Il avait pris du temazepam et du paracétamol avec un verre de vin. On ne savait pas. Personne ne nous a appris. On a juste pensé qu'il était fatigué. Je veux qu'on mette ça dans les écoles. Dans les pharmacies. Sur les boîtes. Pas juste un petit texte en bas.

Ça doit être aussi visible qu'un paquet de cigarettes.

Quiche Lorraine

Quiche Lorraine

novembre 23, 2025

Et puis après on se demande pourquoi les Français sont en dépression. On leur donne des pilules pour les endormir et on les traite comme des cons. On leur dit que c’est normal de dormir 12 heures par jour. On leur donne des trucs pour oublier leur vie. Et quand ils se noient dans leurs propres médicaments, on les appelle « victimes ».

La France est un pays de consommateurs de somnifères. On a transformé le sommeil en produit de consommation. Et maintenant on est surpris quand ça explose ?

Marc Garnaut

Marc Garnaut

novembre 24, 2025

La dépression du système nerveux central n’est pas un effet secondaire, c’est une ontologie de la dépendance. Les sédatifs créent une phénoménologie de l’oubli, une réduction de l’être à l’état de latence. L’individu ne meurt pas seulement de l’arrêt respiratoire, il meurt de la négation de sa subjectivité. Le flumazenil ne peut pas rétablir la conscience, il ne fait que réactiver le récepteur GABA-A. Mais la personne, elle, a déjà perdu le sens du monde.

On parle de signes cliniques, mais on ignore la métaphysique du sommeil forcé.

Stéphane PICHARD

Stéphane PICHARD

novembre 26, 2025

J’ai travaillé en urgence pendant 15 ans. Je peux vous dire que la plupart des cas de surdose, c’est pas des gens qui veulent mourir. C’est des gens qui veulent juste dormir. Ils ont des angoisses, des insomnies chroniques, des vies qui les écrasent. Ils prennent une pilule en plus parce qu’ils pensent que ça va les aider. Et puis ça va trop loin.

On doit parler moins de danger et plus de soutien. Des groupes de parole. Des thérapeutes accessibles. Des alternatives réelles. Pas juste des alertes. Ceux qui prennent ces médicaments ont besoin d’être entendus, pas de se faire culpabiliser.

Yves Perrault

Yves Perrault

novembre 27, 2025

Je vais vous dire ce qui est drôle : les gens qui disent qu’il faut appeler les secours dès qu’on voit une respiration lente… ils ont jamais essayé d’appeler le 15 à 3h du matin. C’est un cauchemar. On attend 40 minutes. On entend une voix qui dit « restez à l’écoute ». Et pendant ce temps, la personne est en train de mourir.

Alors non, je ne vais pas « commencer la respiration artificielle » si je ne suis pas formé. Et vous ? Vous êtes prêt à faire du bouche-à-bouche sur un inconnu ?

La vraie solution, c’est d’interdire ces trucs. Point.


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